Ondes et Relativité
Serge Cabala
Aspects historiques des ondes et de la relativité.

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Chapitre V
Période 1887-1905
Paragraphes 5 et 6

Paragraphe 5. Découverte des rayons x, de la radioactivité et de son énergie.
Paragraphe 6. Un précurseur de l'équivalence matière énergie: Gustave Le Bon.
 

Paragraphe 5.
Découverte des rayons x, de la radioactivité et de son énergie.

Les rayons x.
    En 1895, Roentgen s'aperçut que les tubes de Crookes en action voilaient les plaques photographiques stockées à proximité, et ce d'autant plus que leur tension d'alimentation était plus élevée. Crookes avait noté ce fait sans y prêter attention, il se contentait d'écarter ses plaques photographiques. Roentgen, seul, vit là l'indice d'un nouveau rayonnement. Il montra que c'est la rencontre du flux cathodique avec un obstacle qui provoque ce rayonnement mystérieux, qu'il baptisa x. Ces rayons x furent en 1913 formellement identifiés à de la lumière de très courte longueur d'onde.

La radioactivité.
    Ayant constaté que les rayons x provoquaient la fluorescence de certaines substances, Henri Poincaré posa la question de savoir si à son tour les substances fluorescentes n'étaient pas sources de rayons x capables d'impressionner une plaque photographique. Le 24 février 1896, Henri Becquerel annonça à l'Académie des Sciences, que des sels fortement phosphorescents (le sulfate double d'uranyle et de potassium) exposés plusieurs heures au soleil, puis posés sur une plaque photographique enveloppée dans deux feuilles de papier très épais, font apparaître leurs silhouettes sur la plaque développée. Le 2 mars de la même année, Becquerel signala à l'Académie que l'exposition au soleil était inutile. La luminescence n'est pas la cause du phénomène.
    Toujours la même année, Becquerel montra que les sels d'uranium non phosphorescents et l'uranium métallique produisent les mêmes effets. Becquerel donna le nom de "rayons uraniques" à cette nouvelle émanation.
    L'impression des plaques photographiques par les sels d'urane, avait déjà été notée en 1867 par Niepce de Saint Victor, qui en fit un compte rendu à l'Académie de Sciences.

    En juillet puis décembre 1898, Pierre et Marie Curie annoncent la découverte du polonium puis du radium. Ils qualifient de radioactifs les corps qui sont la source de rayons uraniques.

    En 1899 Ernest Rutherford (1871-1937), qui travailla au Cavendish Laboratory de 1895 à 1898 sous la direction de J.J Thomson, puis devint en 1898 professeur de physique à l'université Mac-Gill de Montréal, montre que les rayons uraniques sont complexes et contiennent deux sous-type. Les rayons alpha, facilement absorbables, et les rayons bêta plus pénétrants.
    En 1900, P. Villard en découvre une troisième sorte encore plus pénétrante, ce sont les rayons gamma.
    En 1902 Rutherford émet l'idée qui fit scandale, que la radioactivité provient de désintégrations atomiques, et avec Frederick Soddy (1877-1956) il dégage certaines lois sur cette radioactivité (constante radioactive, durée moyenne de vie). Puis en 1903, toujours avec Soddy, il présente une théorie des transformations successives subies par le radium. Par un travail acharné, quelques années plus tard, ces deux scientifiques sont parvenus à décrire la chaîne des désintégrations successives, avec ses multiples ramifications, qui transforme l'uranium en plomb en passant par le radium et le polonium.

    Toujours en 1903 Pierre Curie et Laborde observent que le radium dégage en permanence et spontanément une chaleur très importante, plus de 100 (134,7) calories par heure pour un gramme de radium.

    Toutes ces découvertes, faites depuis 1897, bouleversent les énergétistes-équivalentistes-relativistes. Ils peuvent à la rigueur admettre ou refondre les théories corpusculaires de l'électricité et de la matière, mais comment expliquer dans le cadre de l'énergie, cette chaleur permanente produite par le radium. Le principe le plus fondamental de cette école, la conservation de l'énergie totale d'un système isolé, semble complètement démenti par cette dernière découverte.
    Les atomistes, qui tiennent aussi à la conservation de l'énergie, sont tout autant étonnés et déroutés, et certains refusent même toute idée de désintégration atomique, tel Lord Kelvin.
    Fredrick Soddy écrit en 1908: "Les substances radioactives sont perpétuellement le siège, sans être stimulées et sans s'épuiser, d'une continuelle émission d'énergie. Il serait oiseux de nier que la science physique fut prise complètement au dépourvu par cette découverte. Si une douzaine d'années auparavant, quelqu'un se fut aventuré à prévoir l'existence du radium, on lui aurait simplement répondu qu'une telle chose était non seulement tout à fait impossible, mais réellement opposée à tous les principes établis de la science de la matière et de l'énergie."
 

Paragraphe 6.
Un précurseur de l'équivalence matière énergie: Gustave Le Bon.

    Encore en 1903, Gustave Le Bon (1841-1931), directeur de la Revue scientifique, fondateur de la Bibliothèque de Philosophie Scientifique chez Flammarion, reprend son hypothèse, émise quelques années auparavant, que toute matière est radioactive, et ajoute qu'elle contient une énergie intra-atomique prodigieuse. Il montre qu'une pièce de cuivre de un centime (qui pèse un gramme) contient autant d'énergie que plusieurs centaines de tonnes de houille.(La Revue scientifique, 31 octobre 1903; L'année scientifique 1903).

    Le calcul fait par Gustave Le Bon est simple.
    Se basant sur la constatation de l'énorme vitesse des particules émises par les corps radioactifs, et prenant pour valeur moyenne de ces vitesses une fraction k de celle de la lumière (Le Bon prend k=1/3), une matière radioactive de masse m dégage en se désagrégeant complètement, une énergie au moins égale à : k² m c² /2 , ce qui est déjà colossal lorsque m vaut seulement un gramme. Il généralise cette formule à toute matière, et explique par celle-ci l'origine de la chaleur continuelle dégagée par le soleil.

    En 1904 d'autres physiciens, dont J.J. Thomson, proposeront aussi des formules d'énergie pour la matière.
    Max Abraham, toujours en 1904, par des calculs basés sur ce que vient de publier Lorentz à propos de l'électron et de l'électromagnétisme, donnera la bonne expression.
    En se basant uniquement sur la chaleur dégagée par un gramme de radium, Rutherford et Soddy obtiennent aussi un chiffre élevé, qui représentent plusieurs centaines de kilos de charbon, ce qui est toutefois beaucoup moindre que la formule proposée par Le Bon.

    J'ouvre une parenthèse.
    La démonstration de Gustave Le Bon m'inspire le raisonnement approximatif suivant que l'on aurait pu faire en 1903, et il n'est pas certain que personne ne l'ait fait :
    Les particules bêta émises par le radium ont une vitesse proche de c, qui est celle de la lumière. Si toute la matière se dissocie en particules bêta, ce qui semble alors le stade ultime de la désagrégation, une masse m contient donc une énergie (cinétique) d'environ mc²/2 d'après la mécanique classique (Je ne tiens pas compte de la variation de masse avec la vitesse). En plus des particules bêta, on constate un rayonnement gamma très puissant, si on suppose l'énergie gamma égale à l'énergie bêta, on trouve que l'énergie contenue dans une masse m est E=mc².
    Les particules alpha, très lourdes et beaucoup moins rapides, sont des atomes intermédiaires non encore complètement désagrégées mais qui à leur tour le seront.
    La formule obtenue n'est pas vraiment démontrée, mais correspond mieux aux réalités radioactives constatées. On voit ici qu'un raisonnement vraiment vague permet de produire une formules juste.
    Fin de la parenthèse.

    (Rappel : en mécanique classique, un corps de masse m qui se déplace à la vitesse v a une énergie cinétique de mv²/2 .)

    En 1904 Gustave Le Bon dans deux articles intitulés : "La dématérialisation de la matière" et "La matérialisation de l'énergie" , parus dans la Revue scientifique, émet l'idée de l'équivalence de la masse et de l'énergie.
    Il publie ensuite un livre qui expose son travail :"L'évolution de la Matière", traduit dans de nombreuses langues.
    Pour Le Bon : " La force est la matière sont deux formes diverses d'une même chose."
"..., il s'ensuit qu'un corps qui rayonne perd, par le seul fait de ce rayonnement, une partie de sa masse; s'il pouvait rayonner toute son énergie, il s'évanouirait entièrement dans l'éther."

    Le Bon a écrit de nombreux autres articles, et fait, sur ce sujet, des comptes rendus à l'Académie des Sciences. Ses idées furent universellement connues, mais diversement appréciées. Souvent rejetées, car contredisant le principe de conservation de la masse établi par Lavoisier. Henri Poincaré avait aussi objecté que cette énorme quantité d'énergie rendait toute matière très instable, contrairement à l'expérience.

    Le Bon fut parfois comparé, par certains journaux anglais, à Darwin ou Newton.

    Voici ce qu'écrit Le Bon à propos de la dématérialisation de la matière : " Le savant qui trouvera le moyen de dissocier instantanément 1 gramme d'un métal quelconque, radium plomb ou argent, ne verra pas le résultat de son expérience. L'explosion produite sera tellement formidable que son laboratoire et toutes les maisons voisines seront instantanément pulvérisés avec leurs habitants."

    Le Bon était médecin et sociologue (médecin, ou ayant fait des études de médecine, comme beaucoup d'autres qui travaillèrent dans le domaine des sciences tels Young, Mayer, Darwin, Helmholtz, Foucault etc...). Il est maintenant surtout connu pour ses travaux en sociologie. L'idée première de l'équivalence matière énergie, qu'il revendique, semble bien provenir de lui. Elle était en tout cas, bien répandue et soutenue par des formules, lorsqu'Einstein publia ses travaux en 1905.

    Je précise que Poincaré publia ses oeuvres philosophiques, chez Flammarion, dans la collection fondée par Le Bon.
 

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