Ondes et Relativité
Serge Cabala
Aspects historiques des ondes et de la relativité.

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Chapitre IV
L'expérience de Michelson et Morlay.
Paragraphes 1 et 2.
 
Paragraphe 1. L'expérience de Michelson et Morlay.
Paragraphe 2. Complément: l'expérience de Sagnac.
 
Paragraphe 1.
L'expérience de Michelson et Morlay.
 
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        Interféromètre à vitesse -v.                       Interféromètre dans sytème au repos
    La source lumineuse qui émet de brèves impulsions est en bas, la lunette à gauche, les miroirs en haut et à droite. Dans le système au repos, le bras vertical fait un quart de longueur d'onde de plus que l'horizontal, de ce fait, les ondes s'annulent en arrivant dans la lunette à part les parties avant et arrière. A vitesse -v, l'onde reste nulle dans la lunette. Voir aussi l'animation en bas de page.

    Cette expérience est toujours présentée comme la preuve indiscutable des fondements ou principes de la relativité d'Einstein.
    Albert Michelson, est un physicien américain né en pologne en 1852 , mort à Pasadena Californie en 1931.
    Il mit au point en 1881 un interféromètre qui devait permettre de déceler le mouvement de la terre à travers l'éther. Les résultats obtenus en 1881 à Berlin furent négligeables.
    Edward Williams Morlay physicien et chimiste américain (1838-1923) reprit en 1887 avec Michelson l'expérience de 1881. Le matériel employé était des plus sérieux.
    L'interféromètre, construit dans un sous-sol du campus de l'Université de Cleveland (Etats-Unis), était monté sur une grosse pierre de granite carrée posée sur un cylindre de bois flottant dans du mercure. La rotation de la table pouvait ainsi se faire sans difficulté. La table était très massive car on pensait ainsi éviter les influences du vent d'éther sur sa forme, telle une pierre très dure dans un courant d'eau.
 

Photo de l'interféromètre de 1887
 
Schéma du même interféromètre
(Dessin reproduit par moi-même.)
 

    La table faisait environ 120 centimètres de coté et 40 centimètres d'épaisseur.
    La longueur du trajet lumineux avoisinait onze mètres pour chaque sens. Le montage et le réglage de l'appareil était délicat, mais tout à fait à la portée des excellents expérimentateurs qu'étaient ces deux scientifiques.

    Le principe parait à priori compliqué.
    Expliquons le trajet suivi par la lumière dans cet appareil.
    Un faisceau lumineux issu de la source pénètre le premier verre semi-argenté.
    Sur la partie argentée du verre (située au bas du verre dans le dessin) le faisceau se sépare en deux rayons.
    Le premier rayon continue son chemin, traverse le second verre qui n'est la que pour égaler son trajet à celui suivi par le second rayon qui sera vu plus bas, rebondit sur tous les miroirs placés sur la seconde diagonale du carré, revient en sens inverse et pénètre dans la lunette après réflexion au retour sur la partie argentée du verre semi-argenté. (Il parcourt ainsi 22 mètres).
    Le second rayon, réfléchi par la partie argentée, rebondit sur tous les miroirs situés sur la première diagonale du carré, retraverse le verre semi-argenté et pénètre dans la lunette d'observation.
    Le miroir réglable permet de modifier légèrement la longueur d'une des trajectoires suivie par la lumière, ou d'avoir deux chemins supposés de même longueur.
    En ajustant ce miroir, on fait apparaître ou disparaître (on modifie) les interférences observées dans la lunette.

    L'expérience de 1887 consiste en ceci: on cale l'appareil dans une direction, on supprime les interférences observées dans la lunette en réglant le miroir mobile, on tourne l'appareil de quatre-vingt dix degrés sur son socle sans modifier les réglages précédents, puis on observe de nouveau ce qui se passe dans la lunette. Le résultat fut rien ou presque, et ceci quelque soit la position de départ.
    Michelson s'attendait à voir apparaître des interférences pour certaines positions de départ.
    Si maintenant au départ on fait apparaître des interférences, celles-ci demeurent sans grand changement quelque soit la position ultérieure de l'interféromètre.
    Remarque: en réalité, la table tournait lentement en permanence sur son bain de mercure, et les mesures et réglages étaient faits à la volée. Pour un réglage donné du miroir ajustable, on notait soixante fois par tour les variations éventuelles des interférences, les expérimentateurs suivaient la table en marchant.

    Michelson était fermement convaincu de l'existence de l'éther comme beaucoup de scientifiques de l'époque, il crut que l'éther était entraîné par la terre. L'expérience fut refaite dans un sous-sol en 1904 par Morlay et Miller sur des tables de différentes matières, puis à l'air libre et en altitude en 1905 et 1906. Elle fut aussi effectuée dans un ballon en 1926 par Auguste Picard. Michelson renouvela encore son expérience en 1928 avec un appareil très sensible. Les résultats furent toujours négatifs ou presque.
Le vent d'éther sur la matière, matière tel que la conçoivent alors les scientifiques, demeure non détectable.

    De 1887 à 1928, les conceptions de la matière ont pourtant beaucoup évoluées. En 1928 on savait que les atomes étaient très distants et attachés les un aux autres par des champs électromagnétiques, champs électromagnétiques qui étaient pour les partisans de l'éther des vibrations de cet l'éther. Or ces vibrations sont modifiées par le vent d'éther. Les vibrations modifiées rapprochent les atomes les uns des autres et rendent négatif le résultat de l'expérience de Michelson et Morlay. Ce résultat négatif est une preuve supplémentaire de l'union des atomes par des champs électromagnétiques, et pas l'inexistence de l'éther.
    Ce raisonnement ne fut pas fait par Michelson et ses amis. En 1928, la relativité selon Einstein s'étant imposée, toute discussion sur l'éther devenait difficile.
 

    Expliquons maintenant comment l'interféromètre devait détecter le vent d'éther.
    Pour commencer, simplifions l'appareil en rendant rectiligne le trajet effectué par la lumière.
 

L'appareil peut être réduit à deux bras de onze mètres chacun.

    Les bras sont o m1 et o m2 . L'épaisseur du verre demi-argenté est supposée négligeable ce qui évite le second verre. On pose L la longueur commune des deux bras.
    Un éclair de lumière issu de la source se partage en o en deux rayons qui se dirigent l'un sur M1 et l'autre sur M2. Des miroirs ils reviennent sur le verre. Celui issu de M1 traverse (en partie) le verre et tombe dans la lunette. Celui issu de M2 se réfléchi (en partie) sur le verre et tombe aussi dans la lunette. Si les deux bras sont rigoureusement égaux et immobiles dans l'éther, les deux rayons arrivent simultanément à la lunette (il n'y a pas d'interférence).
    Supposons maintenant l'appareil en translation uniforme dans l'éther, de gauche à droite par exemple. On suppose de plus que ce mouvement n'a aucune influence sur l'orthogonalité des bras. Soit v la vitesse de translation, et c la vitesse de la lumière, vitesses données par rapport à l'éther immobile. Pour rendre l'explication plus générale, notons L1 la longueur du bras o m1 et L2 celle du bras o m2. L'éclair de lumière issue de o et qui rebondit sur M2 revient en o au bout du temps

  , avec  .
    Celui issu de o et qui rebondit sur M1 revient en o au bout du temps  .
    Formule qui se trouve en considérant le trajet suivi par ce rayon lumineux dans l'éther.

    Ce dernier trajet est formé par les deux cotés égaux d'un triangle isocèle de hauteur L1 et de base vt1 . Comme dans la figure ci-après.

    La lumière issue du miroir demi-argenté situé alors en o se dirige en oblique sur le miroir M1 puis revient sur le miroir demi-argenté lorsque celui-ci se trouve en o'.
    Si L1=L2, alors t1 = b t2 , soit t1 différant de t2. Ce qui se traduit par une interférence visible dans la lunette.
    Si t1=t2 , aucune interférence n'apparaît dans la lunette, mais dans ce cas on a : L2 = b L1 .

    On règle l'appareil de manière à n'avoir aucune interférence ce qui donne t2 = t1 et L2 = b L1 .
    On tourne ensuite l'appareil de quatre vingt dix degrés, et on constate aucune interférence dans la lunette, on en conclu que t2 = t1 et que L1 = b L2 .
    Soit donc b=1 ce qui semble impossible car la terre n'est pas immobile dans l'espace (elle se déplace aux environs de 27 km/s), ou alors le bras placé dans la direction du vent d'éther se raccourci toujours du facteur multiplicatif b.

    L'expérience recommencée en 1904, par Morlay et Miller, avec des bras de différentes matières donne toujours le même résultat. La contraction obtenue est universelle, indépendante de la nature des corps, dépendante uniquement de la vitesse v.
    Remarque: pour être certain que t2 = t1, l'absence d'interférence doit être obtenue pour toutes les sources lumineuses monochromatiques. Le réglage est bon si l'absence d'interférence demeure lorsqu'on remplace la source lumineuse par une autre quelconque.
    Il semble donc, d'après cette expérience, que tout corps matériel subit de la part du vent d'éther une contraction d'un facteur b dans la direction de ce vent d'éther.
    Cette contraction universelle fut émise la première fois par Fitzgerald en 1893, elle permet d'expliquer aussi pourquoi le résultat reste négatif quelque soit la position de départ des bras.

    On peut s'étonner que Michelson ne l'ai pas émise le premier. Je pense que Michelson voyait trop les corps solides comme des poissons circulant dans de l'eau, alors que Fitzgerald, un des continuateurs des travaux de Maxwell, les percevait comme des complexes de charges électriques circulant dans cet éther, ce qui lui a sans doute permis d'accepter cette universalité de la contraction. Fitzgerald n'a pas expliqué cette contraction, mais l'explication semblait pour les partisans de Maxwell résider dans des considérations électromagnétiques, ce que prouva Lorentz un peu plus tard.
 

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        Interféromètre à vitesse -v.                       Interféromètre dans sytème au repos
  Observer les différentes déformations.
 
 
Paragraphe 2.
Complément : l'expérience de G. Sagnac.
 
    Il est à remarquer que les expériences des Michelson et Morlay donnèrent toujours des résultats quasiment négatifs, mais pas intégralement.
    On peut alors se demander pourquoi ils ne furent jamais totalement négatifs ?
    Ce qui suit répond en partie à la question.

    En 1913 et 1914, G. Sagnac éffectua l'expérience suivante, dite expérience du plateau tournant.
    C'est une variante de l'expérience de Michelson et Morlay qui consiste à détecter la rotation absolue d'un plateau sans faire référence aux objets extérieurs.
    Or contrairement à l'expérience de Michelson et Morlay, celle-ci donne un résultat parfaitement positif.
 

Plateau tournant de G. Sagnac.

    La source de lumière, les miroirs et la lunette sont fixés sur le plateau circulaire, qui peut tourner autour d'un axe qui passe par son centre.
    Expliquons le fonctionnement de cet appareil.
    Un rayon lumineux (représenté en violet ici) issu de la source, se partage en deux sur le miroir demi-transparent.
    L'un des rayons, celui représenté en jaune, tourne autour du plateau dans le sens des aiguilles d'une montre.
    L'autre, représenté en bleu clair, tourne en sens contraire.
    (Les rayons lumineux sont tous de même "couleur", mais représentés par des couleurs différentes sur le shéma.)
    Au bout d'un tour, après réflexion sur tous les miroirs, les deux rayons se rejoignent dans la lunette.
    L'expérience consiste en ceci : le plateau étant à l'arrêt, on note les interférences obtenues dans la lunette, puis on fait tourner le plateau dans un sens ou dans l'autre, on constate alors une modification sensible des interférences, modification d'autant plus grande que le plateau tourne plus vite. Le sens de rotation est également détecté par cette variation, les interférences peuvent par exemple augmenter pour un sens, diminuer pour l'autre, suivant le réglage initial.

    L'explication est la suivante : On suppose le plateau à l'arrêt, et les rayons jaune et bleu superposés. Dans ce cas les deux trajectoires sont exactement de même longueur, et il n'y a pas d'interférence dans la lunette. Lorsque le plateau tourne, dans le sens indiqué, le rayon bleu fait un chemin légérement plus long que le jaune, ce qui se traduit par une interférence visible dans la lunette. (L'observateur, qui peut être remplacé par un appareil photo ou une caméra, tourne avec la lunette.)
    Si au départ, les deux trajectoires ne sont pas de même longueur, on note une interférence, qui se modifie lorsque le plateau tourne, du fait de l'allongement d'une des trajectoires et du raccourcissement de l'autre. De simples calculs en mécanique classique, permettent de prévoir l'amplitude des interférences.
    On construit actuellement des appareils connus sous le nom de "gyroscope optique", ou "gyroscope de Sagnac" qui utilisent ce phénomène pour détecter les accélérations non linéaires. (Des sites sur internet en décrivent. Un moteur de recherche où l'on tape Sagnac permet de les trouver.)

    Cette expérience totalement positive, fut faite après l'élaboration de la relativité restreinte par Einstein, mais avant sa relativité générale.
    Elle semblait contredire le principe de relativité de 1905, qui faisait de la vitesse de la lumière dans le vide, une constante universelle.
    Puisque sur le plateau tournant, la lumière va plus vite dans un sens que dans l'autre, lorsqu'elle est mesurée par rapport à ce plateau, il y a à priori une contradiction avec le postulat de l'invariance de la vitesse de la lumière.
    Après la création de la relativité générale (1916-1919), on a tenté et on tente toujours d'interpréter les résultats de l'expérience de Sagnac au sein de cette nouvelle théorie, mais ce n'est pas plus satisfaisant que ce qui est fait pour l'expérience de Michelson et Morlay avec la relativité restreinte. L'attribution, de principes et de vertus étranges, à l'espace et au temps, est loin de contenter un esprit rigoureux, surtout lorsqu'existent des explications plus claires et plus logiques.
     Chose curieuse, dans la présentation traditionnelle de la relativité, on évite souvent de parler du plateau tournant, et les encyclopédies, dictionnaires et ouvrages scientifiques évoquent très peu Sagnac et son expérience.

  L'interféromètre de Michelson, ressemble par de nombreux points au plateau tournant, et effectivement cet appareil est sensible aux accélérations non linéaires, en particulier à celles dues à la rotation terrestre. Ceci explique en partie pourquoi l'interféromètre ne donne jamais un résultat parfaitement négatif.
    Mais certaines des nombreuses expériences de Michelson fournirent parfois un résultat assez significatif (toujours en deça de celui escompté), qui n'est pas explicable par la seule rotation terrestre. Le résultat étant attaché au lieu de l'expérience, il semble que l'appareil ait alors subi certaines influences locales particulières  (peut-être le champ magnétique ?) .

    La question que l'on peut maintenant se poser est: l'expérience de Sagnac a-t-elle modifié les vues d'Einstein? La réponse est probablement oui, car cette expérience ne pouvait que pousser Einstein et ses partisans à élaborer une théorie plus générale de la relativité, et à mieux définir les principes de relativité restreinte.

 

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