La recherche rigoureuse et approfondie que j'ai menée sur l'évolution des idées prouve qu'effectivement certaines idéologies ont largement favorisé l'essor d'une physique qui rejette les explications mécanistes. Or cette physique est celle justement qui ménage les mystères, celle qui permet à l'esprit de se croire transcendant, celle qui rend possible le développement de doctrines peu claires, celle qui tolère les paradoxes, celle enfin ou une idée nébuleuse a le plus de chance de passer pour un trait de génie. Au nom de cette physique, que de théories étranges ou saugrenues n'a-t-on pas vu fleurir ces dernières décennies! Théories, qui toutes, en plus, se réclament de la relativité et de la mécanique quantique. Les exemples abondent : des particules qui du futur téléphonent à leur passé de sorte que leur futur modifie leur passé; des trous de vers dans l'univers qui permettent de se rendre instantanément d'un endroit à l'autre; des corpuscules appelés tachyons qui vont à une vitesse plus grande que celle de la lumière sans jamais pouvoir descendre en dessous; des méthodes de transport immédiat grâce à la mécanique quantique; des cordes gigantesques qui relient les amas galactiques puis qui deviennent plus petites que l'atome selon l'humeur des créateurs; des électrons qui pensent; des trous noirs énigmatiques qui peuplent les galaxies; des univers parallèles; des big-bangs créateurs à l'image du Dieu biblique; des dimensions cachées dans lesquelles se tapissent des forces terribles; etc... On se rend compte que la haute physique théorique s'est transformée en roman fantastique où la magie des mots tient souvent lieu de raisonnement. Toutes ces spéculations excentriques ou insolites, défendues par des discours obscurs et des calculs incontrôlés, sont pourtant largement popularisées par de nombreuses revues scientifiques. N'importe quelle extravagance est ainsi acceptée et applaudie, surtout si elle provient d'une hiérarchie ou mieux d'une oligarchie en place dans une institution de renom.
On pourrait croire : qu'un peu de rigueur serait
la bienvenue; que des esprits lassés par ces spéculations
stériles aimeraient en revenir à des méthodes classiques
qui firent faire à la physique ses progrès les plus considérables;
qu'une analyse pertinente puisse toujours s'imposer et les incohérences
dénoncées; et qu'enfin une traduction mécanique, nette
et précise, de certaines formules considérées comme
surprenantes, balaye la science de ces utopies et la rende plus cohérente.
Or cette rigueur absolue, peu de scientifiques la
réclame vraiment; ils préfèrent, comme dans tout corps
constitué et bien hiérarchisé, être en accord
avec les idées des maîtres, même si certaines sont inconsistantes
ou absurdes, car sinon aucune promotion ne peut être espérée.
De plus, nombre de jeunes gens qui ont maille à partir avec le raisonnement
classique glorifient le système qui semble contredire ce qui leur
pose des difficultés (leur argument est simple: je n'y comprends
rien et en plus c'est faux comme le prouve la théorie de la relativité!
J'ai même entendu un étudiant dire un jour à la télévision
:"Ce qui me plaît chez Einstein, c'est qu'il a donné un formidable
coup de pied au cul à Newton." Ce qui laisse pantois.).
Vous pensez que j'exagère ou dramatise! Dans ce cas comment se fait-il que des résultats absolument incontestables et aussi élémentaires que ceux que j'obtiens sur les ondes ne puissent pas être mieux diffusés? Alors qu'ils devraient être enseignés dans les lycées tant ils sont importants et même indispensables. Et pourquoi continue-t-on à discréditer les raisonnement mécanistes, ceux de l'école anglaise du dix-neuvième siècle? Et Pourquoi entretient-on une telle agressivité envers l'éther? Alors que cet éther permit à Lorentz et Abraham de donner les bonnes formules avant Einstein.
On est tout de même en droit de se demander
de quelle sorte de religion sont imprégnés ceux qui maintiennent
actuellement les rennes de la connaissance, tant leur comportement semble
fabriqué?
On peut aussi s'interroger sur le but de la recherche
fondamentale en physique? Est-ce la création d'une collection de
principes énigmatiques et de formules quasi-magiques sans lien véritable,
faite pour satisfaire les esprits confus imprégnés d'idéaux
spiritualistes? Est-ce uniquement la production de recettes pratiques destinées
à enrichir le commerce? Ou est-ce une façon de fournir des
emplois à des gens qui se piquent de science, pourvu qu'ils jurent
de croire profondément aux valeurs de la pensée relativiste?
Quelque soit la réponse, force est de reconnaître
qu'une pensée unique, la relativiste, domine tout débat et
censure tout progrès qui va à l'encontre de ses principes.
Bien entendu, pour faire croire à la liberté,
on vulgarise des inepties sur lesquelles on fait semblant de discuter,
mais on se garde bien de répandre ce qui est irréfutable
de peur que s'écroule tout un système. Comme l'a écrit
Bernard Werber dans son "Encyclopédie du
Savoir Relatif et Absolu" : "Aujourd'hui
la censure a changé de visage. Ce n'est plus le manque qui agit,
mais l'abondance." Et effectivement, la multiplication des thèses
absurdes ou contestables opère mieux que toute censure directe.
Le mot splendide de Voltaire :"Je ne suis pas d'accord avec vos idées, mais je ferai tout pour que vous puissiez les exprimer." s'est souvent au cours de l'histoire transformé en: Je ne peux qu'être d'accord avec vos idées, mais je ferai tout pour qu'elles ne soit pas connues.
Je précise que je ne suis pas opposé
à l'utilisation du principe de relativité dans certains cas
précis; mais faire de ce principe un dogme universel est une limite
que l'on ne peut plus franchir lorsqu'on connaît les résultats
généraux que je donne sur les milieux élastiques.
Je ne dénigre pas les travaux d'Einstein, ils sont passionnants
et agréables à lire, mais sont le fruit d'une école
et d'une époque, époque où les relativistes- énergétistes
ne voulaient pas croire aux atomes et aux électrons.
Je précise aussi que j'apprécie beaucoup
les écrits de Duhem, d'Ostwald et de Mach, tout autant que ceux
de Poincaré. Les débats qui eurent lieu montrent le bouillonnement
des idées; et par ce coté, la période autour des années
1900 est remarquable. Ce type de débat manque d'ailleurs cruellement
à l'époque actuelle où l'on préfère
le consensus général.
Un dernier point : Einstein était-il en 1905
pour ou contre les atomes ? Son admiration pour Mach, et son écrit
de juin 1905 tendraient à prouver qu'il n'y était pas favorable,
mais rien ne permet de l'affirmer catégoriquement. Certains prétendent
que son étude du mouvement brownien, faite un peu auparavant, le
placerait du coté des atomistes, mais là encore rien n'est
moins sûr. De même que son hypothèse de "quantum de
lumière" (appelé photon à partir de 1923) ne permet
aucune conclusion. Einstein n'affirme pas qu'il est pour ou contre les
atomes, il les ignore.
La chronique agréée de l'évolution
des idées en physique contemporaine me fait penser à ce mot
de Napoléon :"Qu'est cette vérité
historique la plupart du temps? Une fable convenue." (Dictionnaire
Petit Robert au mot HISTORIQUE.)
Serge Cabala, octobre 2003.
Complément.
De tout temps, des esprits éclairés
trouvent suspectes les explications par principe transcendant.
Les deux citations suivantes, qui méritent
réflexion, montrent ce qu'il en était dans les siècles
passés.
La violence des termes employés par les auteurs
peut parfois choquer, mais souligne à quel point leurs réticences
étaient grandes.
J'ai mis en gras les parties les plus agressives.
Dans l'écrit "De la nature" de Lucrèce (écrivain latin du premier siècle avant J.C.), au Livre I, lignes 635 à 644, on peut lire à propos de la théorie d'Héraclite :"Ainsi ceux qui ont pensé que la matière créatrice des choses était le feu, et que du feu seul était constitué l'univers, se sont évidemment bien éloignés de la vérité. Héraclite est leur chef, et le premier a engagé la lutte, lui que son langage obscur a rendu illustre chez les Grecs, mais plus auprès des têtes légères ques des esprits pondérés et curieux de vérité. Car les sots admirent et aiment de préférence tout ce qu'ils croient distinguer dissimulé sous des termes ambigus, et ils tiennent pour vrai ce qui peut toucher agréablement l'oreille, et se présente tout fardé de sonorités plaisantes."
Plus près de nous, Pascal (1623; 1662, philosophe
et scientifique français), dans son Abrégé sur le
vide, écrit :
" Mon
cher lecteur. Le consentement universel des peuples et la foule des philosophes
concourent à l'établissement de ce principe, que la nature
souffrirait plutôt sa destruction propre, que le moindre espace vide.
Quelques esprits des plus élevés en ont pris un plus
modéré: car encore qu'ils aient cru que la nature a de l'horreur
pour le vide, ils ont néanmoins estimé que cette répugnance
avait des limites, et qu'elle pouvait être surmonté par quelque
violence; mais il ne s'est trouvé personne qui est avancé
ce troisième : que la nature n'a aucune répugnance pour le
vide, qu'elle ne fait aucun effort pour l'éviter , et qu'elle l'admet
sans peine et sans résistance.
Les expériences que je vous ai données dans mon Abrégé
détruisent, à mon jugement, le premier de ces principes;
et je ne vois pas que le second puisse résister à celle que
je vous donne maintenant; de sorte que je ne fais plus de difficulté
de prendre ce troisième, que la nature n'a aucune répugnance
pour le vide; qu'elle ne fait aucun effort pour l'éviter; que tous
les effets qu'on a attribués à cette horreur procèdent
de la pesanteur et pression de l'air; qu'elle en est la seule et véritable
cause, et que, manque de la connaître, on avait inventé exprès
cette horreur imaginaire du vide, pour en rendre raison. Ce
n'est pas en cette seule rencontre que, quand la faiblesse des hommes n'a
pu trouver les véritables causes, leur subtilité en a substitué
d'imaginaires, qu'ils ont exprimés par des noms spécieux
qui remplissent les oreilles et non pas l'esprit : c'est ainsi
que l'on dit, que la sympathie et l'antipathie des corps naturels sont
les causes efficientes et univoques de plusieurs effets, comme si des corps
inanimés étaient capables de sympathie et antipathie; il
en est de même de l'antipéristase*, et de plusieurs autres
causes chimériques, qui n'apportent qu'un vain soulagement à
l'avidité qu'ont les hommes de connaître les vérités
cachées, et qui, loin de les découvrir, ne servent qu'à
couvrir l'ignorance de ceux qui les inventent, et à nourrir celle
de leurs sectateurs."
*Dans l'ancienne physique, l'antipéristase est le principe
selon lequel l'action de deux qualités contraires se renforcent
mutuellement. Selon ce principe une bougie émet plus de lumière
la nuit que le jour, et le feu est plus ardent l'hiver que l'été.
Quand on demandait à un ancien philosophe grec pourquoi un fanal
est éblouissant la nuit et pas le jour, il répondait : c'est
l'antipéristase.